Il faut que je vous dise

Il faut que je vous dise
 
Je n'entends plus ces mots qui me dictaient des poésies.
Ils sont chassés par le vacarme des conflits.
Par ceux que l'on prépare et qui menacent.
La terre même explose et ses volcans menacent les hommes.
Quel accès de folie nous possède ?
 
Alors, n'ayant plus rien à écrire séant,
J'ai choisi pour ne pas vous parler du présent,
De vous parler un peu de pipes
 
 
 
J'ai traîné mes pipes un peu partout sur la planète.
Elles ne m'ont jamais trahi, jamais menti.
Mes pipes ne sont pas des objets.
Quand je fume, elles vivent.
Quand je les pose, elles s'endorment en attendant que je les réveille.
Elles sont de ces amis précieux qui sont toujours là quand on a besoin d'eux.
Non ce ne sont pas des esclaves mais bien des amies.
Et puis il y a Totoche.
Nous avons partagé plus d'un demi-siècle.
Elle a été de toutes mes joies et de toutes mes peines ;
De mes succès et de mes échecs.
Elle n'est pas belle, oh non !
Mais elle a une grande gueule, oh oui !
Totoche, c'est ma boîte à souvenirs.
C'est la pipe que je souhaite à chacun d'entre vous.
Quelques grammes de bruyère qui au fil des années sont devenus si lourds, si lourds.
Il me suffit de l'allumer, seul, pour que la magie se produise.
Tant de ceux dont elle me parle ne sont plus là, emportez par l'existence vers de multiples horizons ou sortis du jeu de la vie.
Elle les fait revenir.
Nostalgie sans tristesse.
Les moments les plus brutaux, les plus terribles enveloppés de l'usure du temps et de l'écharpe de ses volutes, perdent de leur violence.
Les bons souvenirs prennent une lumière plus vive et les coins sombres sont comme estompées par la fumée.
Je ne peux pas imaginer ce qu'aurait été ma vie sans fumer la pipe.
C'est un peu de moi-même.
Combien de fois m'a-t-on dit " tu devrais arrêter de fumer"
Sans comprendre que j'entends alors : "Tu devrais t'arrêter de respirer, de penser, d'être ce que tu es, de vivre en quelque sorte. »
Je les remercie sincèrement de l'intérêt qu'ils me portent.
Mais il faut que je leur dise : "Gardez vos bonnes intentions et occupez-vous de vos affaires. Je m'occupe des miennes"
 
Dis-moi Totoche : « Les gens sont-ils devenus fou ? »

Un grand merci William, toujours beaucoup de sagesse qui nous pousse à réfléchir 

Beau texte William! 
Dont les accents m'ont rappelé un poème de Nazim Hikmet, que j'ai "un peu" adapté ci-après:



Les pipes des hommes
Sont plus belles qu’eux-mêmes.
Plus lourdes d’espoir,
Plus tristes,
Plus durables...

Plus que les hommes,
J’ai aimé leurs bouffardes.
J'ai pu vivre sans les hommes,
jamais sans leur fumée.

Il m’est arrivé d’être infidèle
A ma bien-aimée...
Jamais aux bouffardes que j’ai fumées pour elle.

Jamais non plus mes pipes ne m’ont trompé.
Quel que soit leur langage: pipe, chibouque ou calumet,
J'ai toujours compris toutes les bouffardes.

Rien en ce monde:
De tout ce que j’ai pu boire et manger,
De tous les pays où j’ai voyagé,
De tout ce que j’ai pu voir et apprendre,
De tout ce que j’ai pu chercher et comprendre,
Rien, rien
Ne m’a jamais rendu aussi heureux
Que les bouffardes des hommes.

D'après le poème de Nazim Hikmet "Les chants des hommes" (mis en chanson par Jacques Bertin)

Merci Jaufré  

Superbe adaptation du Chant des Hommes à notre petit univers et qui est aussi prenante que l'original.
Merci Jaufré pour ce beau cadeau.

Jaufré Cantolys a écrit:Beau texte William! 
Dont les accents m'ont rappelé un poème de Nazim Hikmet, que j'ai "un peu" adapté ci-après:



Les pipes des hommes
Sont plus belles qu’eux-mêmes.
Plus lourdes d’espoir,
Plus tristes,
Plus durables...

Plus que les hommes,
J’ai aimé leurs bouffardes.
J'ai pu vivre sans les hommes,
jamais sans leur fumée.

Il m’est arrivé d’être infidèle
A ma bien-aimée...
Jamais aux bouffardes que j’ai fumées pour elle.

Jamais non plus mes pipes ne m’ont trompé.
Quel que soit leur langage: pipe, chibouque ou calumet,
J'ai toujours compris toutes les bouffardes.

Rien en ce monde:
De tout ce que j’ai pu boire et manger,
De tous les pays où j’ai voyagé,
De tout ce que j’ai pu voir et apprendre,
De tout ce que j’ai pu chercher et comprendre,
Rien, rien
Ne m’a jamais rendu aussi heureux
Que les bouffardes des hommes.

D'après le poème de Nazim Hikmet "Les chants des hommes" (mis en chanson par Jacques Bertin)

Beau cliché d'homme entouré de nature qui est non sans rappeler ton partage, Jaufré, à propos du Grousemoor de Samuel Gawith. Tu n'en es peut-être pas conscient mais ton emploi d'une météo contrastée me rappelle le film Oscarisée, "A Man For All Seasons". Mais comme on dit en anglais, "Yeah, but that's another story".